Actualités

Eclairs de notaires

Information Coronavirus

 

Précisions sur le dispositif relatif au sort des loyers (article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19) dans le cadre de l’instauration de l’Etat d’Urgence Sanitaire (EUS) d’une durée de deux mois expirant le 24 mai 2020 (sauf hypothèse de prolongation):  

Par différentes ordonnances (n° 2020-316 ; n° 2020-317 et n° 2020-306), le gouvernement est venu préciser le dispositif permettant de reporter intégralement ou d’étaler le paiement des loyers et autres charges à compter du 12 mars 2020.

Un fonds de solidarité est créé pour une durée de trois mois dont la durée d’intervention pourra être portée à six mois maximum. L’objet de ce fonds est le versement d’aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchée par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation. Si la loi instaurant l’EUS laissait entendre que seules les microentreprises – au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique – pouvaient bénéficier du dispositif, le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 vient en préciser le champ d’application, les conditions d’éligibilité et d’attribution des aides, leur montant ainsi que les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds. Une circulaire du 26 mars 2020 vient également préciser que ce fonds est financé par l’Etat à hauteur de 750 millions d’euros et que les régions se sont engagées à abonder ce fonds à hauteur de 250 millions d’euros.

  • Les bénéficiaires du fonds de solidarité susvisé « ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce. »

Encore faut-il que l’échéance de paiement de loyers et de charges locatives correspondante intervienne entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’EUS (24 juillet).

Par exemple : Le bénéficiaire du dispositif susvisé n’est pas en mesure d’honorer une facture de loyer dont l’échéance est le 3 avril 2020. Son bailleur ne pourra pas lui faire supporter de pénalités de retard, ni activer la garantie à première demande ou une caution, ni-même actionner la clause résolutoire du bail pendant le délai susvisé.

En toutes hypothèses, le juge n’aurait pas été complètement démuni d’outils juridiques pour faire face à cette crise puisque l’article 1231-5 du Code civil lui permet de réduire le montant des sommes (re)qualifiés par lui en clause pénale. Il en va de même en matière de clause résolutoire puisque le débiteur dispose d’un mois pour remédier à l’inexécution de son obligation et que le juge, peut, dans certaines circonstances lui octroyer des délais de paiement.

 L’ordonnance 2020-306 prévoit encore que les astreintes, les clauses pénales, les clauses résolutoires ainsi que les clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé, sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet, si ce délai a expiré entre le 12 mars 2020 et un délai d’un mois après la date de cessation de l’EUS (24 juin). Ces astreintes prennent cours et ces clauses produisent leurs effets à compter de l’expiration d’un délai d’un mois après la fin de cette période si le débiteur n’a pas exécuté son obligation avant ce terme.

Par exemple : Une clause résolutoire est acquise durant la période de référence. Ses effets en sont suspendus et reprendront à compter du 24 juillet (si le débiteur n’a pas remédié à l’inexécution entre temps).

Par ailleurs, le cours des astreintes et l’application des clauses pénales qui ont pris effet avant le 12 mars 2020 sont suspendus jusqu’au 24 juin.

En réalité, les mesures prises constituent une simple suspension des mécanismes « sanction » et non un report des loyers dus en tant que tel, contrairement à ce qui avait été annoncé.

 

Précisions sur le dispositif relatif à la prorogation des délais échus (article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19) dans le cadre de l’instauration de l’Etat d’Urgence Sanitaire (EUS) d’une durée de deux mois expirant le 24 mai 2020 (sauf hypothèse de prolongation):  

Par ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, le gouvernement est venu préciser les mesures « adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d’un droit, fin d’un agrément ou d’une autorisation ou cessation d’une mesure ».

Sont concernés les délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (24 juin).

Une circulaire du 26 mars 2020 vient apporter des éclaircissements sur l’interprétation de ces dispositions.

  • L’article 2 de cette ordonnance prévoit que : « Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli durant cette période sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l’acquisition ou de la conservation d’un droit. »

Les délais conventionnels ne sont pas concernés. Ainsi, la circulaire susvisée exclut du champ d’application du texte le délai pour lever l’option d’une promesse unilatérale de vente. Le texte soulève des questions et notamment, la question de savoir si les délais de réflexion sont concernés dans la mesure où ces délais constituent des délais de protection et non de sanction.

Par exemple : Pour une formalité qui aurait dû être effectuée durant cette période mais n’a pas pu l’être : il faudra prendre en compte : la date de cessation de l’EUS, y ajouter 1 mois et compter avec la limite des 2 mois. Ainsi, pour exemple, en présence d’un acte de vente dont le dépôt au service de publicité foncière devait être effectué au plus tard le 18 mars (24 mai + 1 mois + 1 mois : 24 juillet), le délai butoir est porté au 24 juillet.

  • L’article 3 prévoit également que les autorisations, permis et agréments venant à échéance entre le 12 mars 2020 et le 24 juin sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la fin de cette période.

Par exemple : Un permis de construire qui expire pendant la période de référence sera prorogé de plein droit de deux mois à compter de la cessation de l’EUS augmenté d’un mois (valable jusqu’au 24 août).

  • L’article 7 prévoit également que « les délais à l’issue desquels une décision, un accord ou un avis …/… peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus» jusqu’à la levée de l’EUS augmenté d’un mois (24 juin). Pour les délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période susmentionnée, il y aura report.

Il en de même des délais impartis « pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande ».

Aucune décision tacite ne peut naître durant cette période. Sont également suspendus pour la même période, les « délais imposés par l’administration /… pour réaliser des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions de toute nature » – sauf lorsqu’ils résultent d’une décision de justice.

Pour exemples validés par le Cridon Nord Est (Urbanisme et coronavirus, 28/03/2020 : suspension des délais et procédures) :

Une DIA purgée le 26 mars verrait le délai de deux mois pendant lequel le titulaire du droit de préemption peut préempter ou renoncer à préempter démarrer uniquement à compter du 24 juin.

Une DIA purgée le 14 février et pour laquelle une renonciation tacite intervenait normalement le 14 avril voit le délai de renonciation tacite reportée un mois après la fin de l’EUS pour le temps qui restait à courir au 12 mars.

  • L’article 5 de l’ordonnance précise encore que « Lorsqu’une convention ne peut être résiliée que durant une période déterminée ou qu’elle est renouvelée en l’absence de dénonciation dans un délai déterminé, cette période ou ce délai sont prolongés s’ils expirent (entre le 12 mars et le 24 juin), de deux mois après la fin de cette période. » 

Pour exemple : Un congé doit être donné avant le 14 avril et ne l’a pas été. La dénonciation pourra intervenir jusqu’au 24 août.

Il s’agit d’un régime dérogatoire optionnel et une clause de conseil donné demeure possible (voir en ce sens, Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période : « Ainsi, l’ordonnance ne prévoit pas de supprimer la réalisation de tout acte ou formalité dont le terme échoit dans la période visée ; elle permet simplement de considérer comme n’étant pas tardif l’acte réalisé dans le délai supplémentaire imparti »). Des corrections seront apportées si nécessaire dans la loi de ratification.

Ces différentes ordonnances, « fourre-tout » de divers mécanismes juridiques (interruption, suspension, report…), de différentes sanctions (nullité, irrecevabilité, inopposabilité…) et de délais distincts nécessiteront de procéder à une analyse au cas par cas de chaque situation. Nous sommes à votre disposition pour vous assister en ce sens. Pour toute information supplémentaire, n’hésitez pas à nous solliciter.